Mars 2017
Existerait-il une institution de soin congruente aux enfants présentant des difficultés personnelles, familiales, sociales, pour lesquels la simple insertion dans une école publique est difficile et requiert un personnel spécialisé ? Telle est la question qui se pose, et à laquelle les pouvoirs établis, les associations privées et les établissements spécialisés, essaient de répondre par la voix de leurs représentants qualifiés.
Ont dit ainsi ce qu’ils en pensaient des praticiens de l’école de Bonneuil sur Marne, créée par Maud Mannoni, de l’École de la Neuville, parrainée par Françoise Dolto, du Courtil en Belgique, des membres du GRFCCP de Belfort-Montbéliard. En ont parlé également des spécialistes oeuvrant en institutions à Limoges, à Épinal, et d’autres pratiquant à Paris et dans sa région, membres de la Libre Association Freudienne, fondée par Gabriel Balbo, et à laquelle sont affiliés Laetitia Aucharles, Jean-Yves Gauthier et Frédéric Duplessy, organisateurs de ces journées scientifiques tenues à Limoges les 25 et 26 juin 2016. Beaucoup se réclament notamment de S. Freud et de J. Lacan, de l’oeuvre de J. Bergès et de G. Balbo.
Tous ont-ils réponse à tout ? Certainement pas, beaucoup reste à penser, et à entreprendre, à créer surtout. C’est assez dire que la congruence recherchée ne manque pas de possibilités, pour être peu ou prou approfondie sinon réalisée, afin de ne pas être une chimère. Les textes qui suivent reprennent les arguments, pour parvenir à en trouver les opportunités, dans le cadre d’une éthique où le sujet, la famille, le soin et le social, peuvent y trouver leur compte.
Quel est le rapport entre institution et pulsion, dont le démontage montre quel en est le cirque institutionnel, et comment ce cirque est loin de n’en être que la portion congrue.
Que serait une institution de soins congruente dans le champ de la Psychanalyse ? » pour que du sujet de l’inconscient puisse y advenir, ne serait-ce que par pulsations, et que du dire y soit enfin audible et y prenne sens, n’y soit pas seulement in-ouie.
Une institution congruente serait alors non pas un lieu de vie mais un lieu pour vivre où il ne se fait pas de psychanalyse in situ mais où toute la clinique institutionnelle est rigoureusement référencée à la psychanalyse en tant qu’elle est un ensemble de connaissances sur la question du sujet de l’inconscient et de ses formations structurées comme un langage. Un lieu lui-même soumis à l’analyse de ses fonctionnements.
La fonction fondamentale d’une institution congruente dans le champ de la psychanalyse doit faire valoir l’économie du désir (désir du sujet) jusqu’alors forclose par le discours du capitaliste et l’économie de marché.
Article qui aborde la question du souci de soi dans une institution éclatée et congruente – celle de l’École expérimentale de Bonneuil – à travers le récit de rencontres avec Olivier et Yasmin. Rencontres – désireuses de Possibles – où se jouent des partitions à partir de ce que nous ignorons. Des rencontres à l’écoute du savoir de celles et de ceux qui ne sont pas comme les autres mais… qui sont comme les autres.
Si les personnes en difficulté psychique grave ont subi une faille dans le développement de la psyché décrit par Freud (développement repris et travaillé par ses successeurs), permettre alors à ces personnes de retrouver les différentes étapes du développement (indifférenciation puis socialisation) avec l’aide de la psychanalyse, cela me semble générateur pour elles d’une véritable renaissance.
Entre intérieurs et extérieurs est une discussion qui illustre la complexité des notions d’intérieur et d’extérieur à travers trois lieux institutionnels : l’École expérimentale de Bonneuil, Radio la Colifata et l’École de la Neuville.
Qu’est-ce qui pousse les humains à créer et à définir sans fin des institutions ? Leur imaginaire qui court de l’avant pourrait nous faire penser au déploiement de la pulsion qui reste de toute façon et quoi qu’il arrive sans objet. Il reste difficile de proposer une institution même particulière, c’est-à-dire dans notre cas thérapeutique puisque la réalité des lieux avec celle de leurs pensionnaires est sujette à un changement perpétuel ; réalité soumise aux pressions du Réel de l’existence et de ses débordements pulsionnels.
Est-ce que l’institution peut faire valoir et assurer la fonction du secret en son sein, comme marque et inscription de la fonction signifiante du manque ? C’est à partir d’une incongruité clinique et institutionnelle que cette question est posée.
Qu’est-ce que la relation d’abandon ? G. Agamben nous rappelle qu’abandonner dans les langues romanes signifiait aussi bien délivrer de, que mettre au pouvoir de, ou à la merci de. C’est dans l’angle formé par ces données et celles de la vie que nous étudions la relation d’abandon qui règne entre l’institution et la psychanalyse, entre la vie animale et le désir.
Un psychologue de formation analytique peut travailler en institution de manière congruente avec les concepts de la psychanalyse, mais sous certaines conditions. Un exemple de montage institutionnel en est donné.
La littérature foisonnante qui remonte finalement à la création de la psychanalyse dit combien la psychanalyse formelle semble incongrue avec le dispositif institutionnel, souvent même quand elle y est bienvenue, comme en témoignent des interventions de ces journées. Pourtant elle prétend s’y exercer toujours, vaille que vaille, elle s’accroche, s’acharne, revendique, se défend, s’infiltre, parfois de façon individuelle et subversive quand l’institution n’en veut pas. Ce n’est pas sans effets pour les usagers, mais cela ne manque pas de questionner le S barré de l’analyste qui s’y colle et la psychanalyse qui s’y exerce. Une institution congruente dans le champ analytique devrait-elle alors être une institution pensée exclusivement et complètement analytiquement ? De quel discours se soutiendraitelle pour qu’un discours de l’analyste puisse y être tenu alors par tous ses travailleurs ? Avec quel objet, au nom de quelle éthique, quelle pratique, quelle théorie ? Pour quel(s) Sujet(s) ?
Cet article est écrit en mode consultant, en s'appuyant notamment sur un texte écrit par Olivier Douville en 1990.
Petites histoires de la folie à l’âge moderne
Soutenir la place du psychanalyste sollicite une éthique qui consiste, selon Jacques Lacan, à « accueillir la parole du sujet, dans le silence de l'auditeur […] qui, pour parler du silence de l’analyste, ne veut pas dire qu'il ne fait pas de bruit, mais qu'il se tait au lieu de répondre ». (Jacques Lacan, «Variante de la cure-type », Écrits, Seuil, 1966, p. 351.)
Or, en institution, « garder le silence » ne suffit pas ; il s'agit de « porter la parole du sujet », parfois à l'encontre du collectif soignant, qui tient un discours SUR le patient et ses symptômes. Ce choix nécessite qu'une instance soutienne la demande d'analyse dans l'institution et en protège l'espace singulier, lorsque cela est nécessaire.
Ce texte témoigne de l’apport de la psychanalyse à la psychiatrie, dans un service de psychiatrie hospitalier pour adultes, à travers deux dispositifs à l’initiative du docteur Hugues Zysman : des présentations cliniques
de malades et des présentations de cas cliniques sur dossiers.
Passage du congru à l’incongru dans une institution psychiatrique : avec l’intronisation de l’informatique et l’exclusion de la psychanalyse, comment s’y prend-on, désormais, avec l’humain, le symptôme ou la folie ? Quand cette question si essentielle revient au même que de se demander comment on s’y prend pour attraper un crocodile avec une pince à épiler, une paire de jumelles et une boîte d’allumettes vide…
L’institution Maison Verte Enfants de Besançon – Lieu de parole – Accueil des enfants de 0 à 6 ans et leurs parents. Dans un souci de soin psychique, elle prend en compte l’ordinaire des avatars et achoppements du développement de l’enfant, c’est-à-dire des symptômes dans leur rapport à l’inconscient. Les modalités de fonctionnement s’appuient sur une éthique, une théorie, et l’hypothèse d’un transfert. Chaque accueillant s’inscrit dans ce dispositif et dans une équipe. Il s’engage à un travail d’élaboration commune après chaque séance. Pendant quelques années, certaines équipes ont privilégié l’interchangeabilité de leurs membres. Le transfert « diffracté » sur le lieu et sur les accueillants n’a pas empêché des échanges riches où « la vérité congrue, selon Lacan, se met en garde dès la cause du désir. »
Historique de l’ouverture d’une Maison Verte pour adolescents et pré-adolescents à Besançon ; présentation, fonctionnement, premier bilan et perspectives.
Ce texte est un simple témoignage au cours de plusieurs années de travail dans un service de neurologie, en institution hospitalière, en tant que « neuropsychologue » ou cognitiviste pour être plus explicite ; et il fait suite à des échanges avec mes collègues « psychologues cliniciens », quant aux nouveaux modes de travail qui leur sont proposés dans leur institution hospitalière psychiatrique – cf. article précédent d’Anne Gaudard.
Ces échanges ont pu avoir lieu du fait de nos engagements de longue date dans un autre travail, psychanalytique, individuel et en groupe, par le biais de cette autre institution qu’est le GRFCCP. Le but de ce texte est de mettre en avant quelques éléments qui ont rendu ces rencontres possibles, plus particulièrement du côté de l’institution hospitalière.
Tout se passe comme si le travail de parole de l'enfant ne coutait rien dans un cadre institutionnel ! Et pourtant… payer pour venir parler relève-t-il de l'évidence ? Payer quand on s'adresse à une institution qui justement propose la gratuité des soins aux familles qui consultent ? Payer alors que le praticien n'est pas autorisé à recevoir de l'argent ! Ou encore payer quand on est un enfant ! Est-ce possible ? L'acte ne serait-il pas incongru ? Témoignage d'une pratique clinique en CMPP où le paiement symbolique fait partie intégrante de la cure avec les enfants.
L’exercice de l’esprit critique, l’enseignement du libre examen paraissent constituer un fil rouge qui unit les siècles et les penseurs en Europe. De Montaigne à Machiavel à Pierre Bayle à Marc Bloch, depuis la Renaissance et jusqu’à l’époque moderne, la lutte contre la manipulation de l’opinion, source des fanatismes de tout bord, et en faveur de la tolérance inspire les lettres des différentes nations dans une choralité unifiante. «Désabuser le monde de ses erreurs », ne jamais faire quartier au mensonge, aux illusions destinées à rendre les gens crédules, lutter pour la liberté de pensée, voilà la visée d’un esprit européen qu’il faudrait peut-être retrouver à la base de nos options de valeur.
Dans son ouvrage Féminin, révolution sans fin, Gérard Pommier vient interroger le rapport du père au féminin et la place du féminin en chacun de nous dans son articulation au désir. Des questions essentielles qui renvoient à l’objet même de la psychanalyse dans ce travail subjectif de l’assomption de l’être.